Moa

Je sais que nous vous présentons assez souvent Schiele, mais je n'ai pas pu résister à cette belle gouache. La femme représentée ici est la danseuse Moa Mandu. Icône de la culture viennoise du tournant du siècle, elle a servi de modèle à Schiele pour de nombreux portraits. Avec son partenaire de vie, Erwin Osen, acteur et mime, qui était également l’un des amis proches d’Egon Schiele, elle partageait sa fascination pour les formes d’expression corporelle ainsi que pour la distorsion extrême des expressions faciales et des gestes.

Schiele a trouvé que ce duo extravagant était très séduisant. Et bien qu’il soit avant tout un artiste dit "linéaire", Schiele s’est inspiré du sens du style audacieux de Mandu pour créer certaines de ses plus grandes œuvres. Quand Osen, interprète de cabaret extravagant et outrageux, a posé pour Schiele, l'artiste a dû avoir l'impression que ses émotions intenses et réprimées avaient pu enfin s'exprimer. Il a utilisé le vocabulaire du mime dans la plupart de ses oeuvres et surtout dans ses autoportraits.

Cette image de Mandu figure parmi les portraits les plus picturaux de la danseuse et fait également partie de ceux qui sont les plus parfaits en termes de composition et d'utilisation de la couleur. L’architecture ornementale de ses vêtements, associée à son visage plus naturaliste, nous ramène toujours au grand modèle de Schiele, Gustav Klimt. Quant à Schiele, Mandu et Osen, leurs manières bohèmes étaient légendaires. À une époque, ils ont été à l'origine de plusieurs scandales à Krumau, si bien que Schiele y abandonna son studio en 1911 après seulement quelques mois d'installation!