Augustus Leopold Egg
Les voyages vous manquent ? :-)
Le tableau d'aujourd'hui représente deux jeunes femmes élégamment vêtues, assises l'une en face de l'autre dans un compartiment étroit de première classe. On dirait une image miroir.
Ces deux femmes pourraient être sœurs. Elles sont habillées de façon identique d'amples vêtements de voyage en soie gris perle, leur chapeau pareillement posé dans leur giron. Elles sont installées symétriquement sur des sièges qui se font face de chaque côté de la vitre. La fenêtre, en trois parties, encadre le panorama comme un triptyque et on aperçoit par cette ouverture le site de Menton sur la Côte d'Azur; mais aucune des deux voyageuses ne semble y prêter attention. Le train est en mouvement, ainsi qu'en atteste le balancement du pompon au store de la fenêtre. Le compartiment lui-même est symétrique, comme ses passagères.
Le mot "compagnes" dans le titre du tableau suggère peut-être aussi une certaine ironie. Elles sont compagnes dans le sens où elles partagent le même espace et portent la même robe mais, en fait, elles n'interagissent pas. Chacune d'elle semble indifférente aux éléments extérieurs de l'expérience, qu'il s'agisse du paysage au loin, ou de la personne qui est tout près d'elle. L'opulence de l'aristocratie et l'avènement des moyens de transport modernes se combinent ici pour faire de ces deux personnes des individus isolés de tout ce qui n'est pas elles-mêmes : elles voyagent dans ce confort mais laissent totalement de côté l'expérience du voyage.
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